Ombres & Complot - Chapitre Final

" Je dois faire quelques ajustements sur le moteur, c'est très rapide, mais il faudrait que tu tiennes ces deux fils ensemble. (Elle lui désigna les câblages sous le volant.)"

Samara, dépassée par les événements se contenta d'obtempérer et pris place dans la voiture, tenant chaque fil dans une main, visiblement concentrée.

Alis alla se placer à l'avant du véhicule, essayant de contenir ses tremblements d'angoisse. Profitant du couvert du pare-choc, elle fouilla dans les poches du trench et en sortit les deux objets désirés.

" Surtout tiens les bien, ça devrait démarrer. "

Elle expira profondément, et revint se placer à côté de Samara, les mains glissées dans ses longues poches.

Cette dernière avait toujours les yeux rivés sur les câbles, penchée sur le côté pour bien voir ce qu'elle faisait. Elle entendit vaguement un cliquetis métallique mais n'y prêta pas attention.

" Hey pétasse. "

Samara tourna la tête comme elle put, mal installée, prenant soin de ne pas lâcher les fils pour apercevoir Alis, un étrange petit instrument dans une main, l'autre juste derrière avec une sorte de tube métallique. Elle eut à peine le temps de froncer les sourcils.

En un instant, Alis, visant soigneusement la tête de la rouquine, alluma le briquet et écrasa son pouce sur le bouton de la bonbonne de déodorant, projetant un jet de flamme vers le visage stupéfait.

Samara poussa un hurlement terrifiant tandis que les flammes lui léchait le visage et embrasait ses longs cheveux roux. Il lui fallut quelques instants pour se dégager suffisamment et repousser Alis d'un violent coup de pied, mais le feu avait déjà fait beaucoup de dégâts. Elle hurla de rage en s'extirpant du véhicule, ses yeux brûlés ne voyant plus que de vagues formes floues.

Alis se releva péniblement, ayant lâché le briquet dans sa chute. Déjà Samara était sur elle et l'attrapait par l'épaule pour lui envoyer un violent coup au visage. Elle sentit la tête lui tourner et ne put réagir à temps pour empêcher les mains de son adversaire au visage fondu dégoulinant de sang de se refermer autour de son cou.

Samara grognait de rage en lui serrant la gorge de toutes ses inhumaines forces et déjà la jeune femme commençait à voir sa vue se teinter de points blancs. Essayant vainement de réduire l'emprise sur sa gorge d'une main, elle serra la bonbonne de déo dans sa main et la frappa violemment à l'œil.

Hurlant de douleur, Samara lui arracha la bonbonne et, soulevant la jeune femme d'une main, elle la projeta à terre quelques mètres plus loin.

Alis gémit de douleur en s'écrasant sur le sol, son épaule la lançant douloureusement et lutta pour reprendre son souffle et se traîner aussi loin que possible de la furie blessée.

Samara revenait déjà vers elle, en proie à une rage incommensurable. Elle articula à grande peine d'une voix terriblement rauque.

" Tu me serviras tout aussi bien morte. "

Rampant en arrière à toute vitesse, Alis réussit à reprendre ses appuis et se releva à toute vitesse, courant vers la hache qu'elle arracha du mur. Elle planta fermement les pieds dans le sol, prête à accueillir Samara qui s'arrêta en ricanant, avant de tendre la main vers elle.

" Je ne te vois peut être plus bien mais je peux encore te sentir. Tu empestes la peur. "

Alis écarquilla les yeux et voulut protester, le souffle court alors qu'elle lâchait la hache et avançait pas à pas, à corps défendant, vers la femme brûlée. Elle gémit en luttant de toutes ses forces pour reprendre le contrôle, mais l'emprise était trop forte. Samara n'eut plus qu'à tendre le bras pour l'attraper par le col. Elle la souleva du sol et se dirigea vers la voiture avant de la jeter violemment contre la portière arrière.

" Peu importe l'époque c'est toujours la même histoire. Tout irez beaucoup mieux si vous vous contentiez d'obéir. "

Alis sonnée, ne put que subir alors que la poigne de Samara se refermait sur ses cheveux.

" Ho si on pouvait casser une vitre... "

Elle frappa violemment la tête de la jeune femme dans le carreau. Alis cria de douleur tandis que sa tête heurtait la vitre, se débattant comme un beau diable. Voyant que celle ci ne cédait pas, Samara renouvela l'expérience avec plus de vigueur, éclatant la vitre avec le crâne d'Alis qui sentit le verre céder, et d'innombrables angles vifs lui taillader la peau. Sa tête lui tournait, son corps n'était plus que souffrance et elle sentait que ce n'était plus qu'une question de temps avant qu'elle ne perde connaissance. Samara lui lâcha les cheveux en grognant de rage.

" Ça aurait pu être si facile... "

Déjà saisissait elle à nouveau Alis, l'attrapant cette fois par une cheville pour la tirer vers elle.

Alis cria, suppliante et dans un dernier effort de volonté, passa son bras à travers la fenêtre de la voiture, s'efforçant de s'y retenir.

" Qu'est ce que tu crois faire petite garce? "

Samara tira plus fort et voyant que la jeune femme s'accrochait plus que tout et glissait un deuxième bras dans le véhicule, elle la frappa au côté, visant sa blessure.

Alis retint un hurlement de douleur qui sortit sous la forme d'un long râle et tint bon malgré tout. Au milieu des formes floues et du brouillard qui commençait à submerger sa vision, elle aperçut une sangle en cuir au pied du siège arrière et tendit désespérément la main vers la sangle qui était encore à quelques centimètres.

Elle ferma les yeux et tendit tout son corps dans un ultime effort.

Samara la tira violemment en arrière, l'arrachant au véhicule et la laissant tomber sur le sol. Alis, la main refermée sur la sangle tira le fusil à pompe avec elle, et à peine à terre, l'armant dans un claquement sec, fit feu. Le premier coup atteignit sa cible au ventre, déchirant les entrailles, le second vint achever ce qui restait du visage de Samara qui s'effondra.

Alis s'écroula sur le sol, tâchant de calmer sa respiration, et porta la main à son côté en gémissant.

Elle était dans un sale état, mais pour la première fois depuis longtemps, elle se sentait bien. Elle se releva péniblement en entendant du bruit en provenance du couloir, et pointa le canon de l'arme vers l'humanoïde à la peau grise couverte de tentacules et d'appendices abominables qui l'observait fixement.

Elle serra les dents et lui rendit son regard avec détermination.

" J'ai fais ce que vous attendiez de moi. Maintenant fichez le camp, ou suivez là. "

La créature l'observa quelques instants, hésitante, puis s'éloigna à reculons, disparaissant dans la pénombre du couloir.

Alis poussa un long soupir en abaissant le canon, puis reporta son attention sur la hache un peu plus loin.

Elle œuvra machinalement, tailladant le bras de feu Samara et en extirpa le parasite avec précaution, l'observant avec un certain dégoût.

Jetant un coup d'œil autour, elle ôta son trench et sa robe et observa la blessure à son côté qui était de nouveau ouverte et dans un mauvais état. Ça ne détonnait pas tellement avec son corps couvert d'ecchymoses. Elle détourna le regard, en grimaçant, et y glissa lentement le parasite. Elle fut prise de frisson et de tremblements en sentant la chose s'animer d'une volonté propre et se glisser en elle.

Déjà la blessure semblait moins douloureuse et elle constata avec stupéfaction que la plaie commençait déjà à se refermer sous ses yeux.

Tout son corps lui semblait moins douloureux, presque apaisé. Elle se dirigea vers sa propre voiture, nue, et fouillant sous le pare-choc, y trouva la petite boite collée dans laquelle elle conservait un double de ses clés "au cas où". Un étrange bonheur s'empara d'elle quand elle retrouva ses affaires, et elle eut tôt fait d'enfiler des vêtements confortables et des vraies chaussures.

Elle esquissa un doux sourire, ressentant un sentiment de protection comme elle n'en avait jamais ressenti. Comme si une voix lui susurrait à l'oreille qu'elle ne craignait plus rien.

Elle enleva la barre qui bloquait la grande double porte et fut étonnée de la facilité avec laquelle elle parvint à les ouvrir. La nuit tombait dehors et elle regarda l'horizon au loin, le soleil couchant se reflétant sur les vagues. Tout avait l'air particulièrement calme.

Elle retourna à sa voiture et s'y installa, écoutant avec satisfaction le ronronnement du moteur qui démarrait.

Elle roula sans encombre jusqu'à l'autre bout de la ville, les quelques silhouettes croisées semblant s'éloigner en hâte.

Elle ressentit comme une légère appréhension en passant le panneau qui indiquait la sortie de la ville, et il lui fallut plusieurs kilomètres avant que cette sensation ne se dissipe.

Elle quittait enfin la ville, et une petite voix au fond d'elle lui murmurait que Celui Qui Sommeille avait de grands projets pour elle.

Loin de s'en inquiéter, elle esquissa un sourire, euphorique.