Céline - L'Ame Fée

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Une vision, un rêve, une rencontre...
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Le rire du vent

La forêt est calme. On entend le bourdonnement des insectes qui profitent de la tiédeur du soleil en cette fin de journée de printemps pour butiner de fleur en fleur avant de se poser pour la nuit et le dernier chant des oiseaux.

J'aime ce moment de la journée, quand le soleil s'approche de l'horizon et que les ombres s'allongent. Je sors après le repas, laissant mes enfants et mon mari finir de ranger la maison. Comme tous les soirs, je me dirige vers l'étang des fées, j'en fais le tour. Parfois je m'assieds sur le tronc d'un arbre tombé au cours d'une tempête hivernale et je reste là à regarder les ondulations à la surface de l'eau quand je fais des ricochets avec une pierre. Trois ou quatre pierres chaque soir que je ramasse sur le chemin avant d'arriver à l'étang.

Ce soir, assise au bord de l'eau, je réfléchis. Je pense à ma vie, à ce que j'ai vécu. Mariée depuis trente ans, j'ai quatre enfants qui sont grands et dont les derniers vont prendre leur indépendance dans quelques mois. Mon mari m'aime, je l'aime mais ce n'est plus la passion de nos vingt ans.

Quand je l'ai rencontré, j'ai cru avoir trouvé l'âme sœur, l'âme complémentaire avec laquelle je finirai mes jours. Mais, le temps passe et si nous avons partagé beaucoup de bonheur ensemble, quelque chose se désagrège.

Il y a quelques semaines, une amie au cours d'un stage de méditation m'a parlé des âmes fées, des âmes encore plus fusionnelles que les âmes sœurs. Une âme divisée à la naissance, une moitié dans un corps d'homme, l'autre moitié dans un corps de femme.

Mon amie, bien plus avancée que moi sur le chemin de la méditation m'a dit un soir, alors que nous nous couchions :

— Céline, tu es une âme fée, tu dois retrouver ta moitié.

— Mais, Florence, je l'ai trouvé c'est mon mari...

— Non ! m'a-t-elle affirmé, lui c'est ton âme sœur, une personne avec qui tu as vécu et partagé des instants forts mais ce n'est pas ton âme complémentaire... tu verras, quand tu rencontreras ta vraie moitié, tu la reconnaîtras.

Ces paroles m'avaient touchée et ce soir plus j'y pense et plus je trouve qu'elle a raison. Il n'est pas mon âme fée.

***

Un frôlement, le vent qui se lève, glisse sous ma jupe et je sens un souffle tiède remonter le long de mes cuisses. Je suis frustrée de ne pas pouvoir sentir sa caresse entre mes cuisses, ma culotte empêche le souffle de l'air de frôler ma peau à cet endroit. Que m'arrive-t-il? Pourquoi ai-je ces pensées?

Assise, je serre mes cuisses. Ce mouvement a pour effet d'enserrer mon clitoris. Je frissonne et gémis.

J'entends alors comme un rire cristallin dans mon dos. Je me retourne mais, non, je suis seule. Les feuilles s'agitent sous le léger vent qui vient de se lever.

Je décide de rentrer.

A la maison, les enfants sont couchés et mon mari regarde une émission de voyage à la télé. Je me penche pour l'embrasser.

— Je vais me coucher, lui dis-je.

— Oui ma chérie ! J'arrive.

Dans la chambre, en me déshabillant, je constate l'humidité de ma culotte, signe de mon excitation au bord de l'étang. J'enfile une chemise de nuit et je me couche.

Dans l'obscurité et le silence de la chambre, j'entends encore ce rire. Impossible, je suis seule, mon mari est en bas, les enfants dans leurs chambres et cette envie irrépressible. Cette force qui me pousse à glisser ma main entre mes cuisses, ma chemise de nuit remontée, je ferme les yeux quand mes doigts trouvent la vallée du plaisir et glissent dans la grotte des béatitudes.

Sous mes paupières fermées, un visage apparaît : un homme brun aux yeux verts qui me sourit, me tend la main. Je tends la main et quand nos doigts se frôlent, je jouis. Je jouis comme jamais je n'ai joui, de tout mon corps, toutes mes nerfs réagissent. Mon plaisir jaillit de mon ventre comme une fontaine.

Submergée, débordée, épuisée, je m'endors. Je rêve de ce visage qui ne me quitte pas de la nuit et qui me fait l'amour dans mes rêves.

Le souffle du vent

Cela fait plusieurs heures qu'il est là, à l'affût, allongé sur le sol, caché par les buissons. Il ne sait pas ce qui l'a attiré au bord de cet étang, loin du lieu où il vient habituellement poser son appareil photo.

Son amie, Florence, lui avait parlé de cet endroit au milieu des bois, avec ses ombres fantomatiques au coucher du soleil. Elle avait raison. Il se dégage de cette forêt une aura de magie. Les arbres, les fleurs et même les pierres semblent vouloir lui annoncer qu'un événement rare va se produire.

Il avait déjà mis en boit une famille d'oies bernaches égarées loin de sa zone de reproduction, un héron cendré qui attendait le bon poisson.

Il prit au vol l'éclair bleu d'un martin-pêcheur au moment où il fendait le miroir aquatique et même une biche et son faon de l'année venu se désaltérer. Toute la forêt était venue le saluer avec la visite d'un blaireau.

Maintenant, il tente de capturer cet instant où le cercle rouge du soleil crée des ombres uniques entre les troncs de la futaie de l'autre côté de l'étang.

C'est à cet instant qu'il la voit dans son objectif. Telle Viviane sortant de son lac pour séduire Merlin, elle porte une longue jupe azur avec un gilet assorti par-dessus son chemisier blanc. Sa longue chevelure brune encadre un visage arrondi illuminé par ses yeux de la même couleur que ses vêtements.

Il ne peut pas s'empêcher de la photographier quand elle s'avance au bord du lac pour s'asseoir sur ce tronc, face au soleil. Elle s'installe, appuyée sur les mains derrière elle, fermant les yeux, écartant les genoux, offrant sa poitrine aux derniers rayons du soleil.

Il entend alors un rire cristallin porté par un doux vent tiède qui tourbillonne au-dessus de l'eau. Ce vent lui porte le parfum de cette femme. Il a l'impression de ne faire plus qu'un avec ce vent qui l'emmène vers la femme aux yeux fermés. Il l'enveloppe de son souffle. Léger comme l'air, il frôle sa peau. Il remonte sous la jupe. Il voit la peau frissonner, les cuisses se fermer puis s'ouvrir pour s'abandonner à la douce caresse aérienne. Il est le vent.

Il parcourt les moindres replis de ce corps féminin. Il ressent le plaisir qu'il procure. Il entend le gémissement de la femme. Ce gémissement qui l'entraîne à son tour dans une profonde extase.

Quand il revient à lui, il est toujours allongé, la femme est partie et la pleine Lune a remplacé le soleil dans le ciel nocturne.

Il se lève, il s'approche du tronc. Il perçoit toujours la présence de l'inconnue.

Il caresse le bois là où elle était assise. Un frisson le traverse, il ferme les yeux et il la voit dans son lit. Il s'allonge à côté de la bûche et la rejoint dans ses rêves.

Le plaisir du vent

Toute la journée, j'ai eu ce visage dans mon esprit. Devant mes élèves, devant mes collègues, dans la rue, au supermarché, je cherchais cet homme au regard ténébreux. Quand je pense à lui, mon ventre papillonne. Cette sensation magique que l'on connaît adolescente lorsque l'on croit avoir découvert le grand amour.

— Ma chérie, tu vas bien?

— Oui... oui... je rêve. Excuse-moi, je repense à mon inspection qui va bientôt arriver.

— Je comprends, me dit mon mari en prenant son assiette vide pour la déposer dans l'évier.

— Je vais faire ma ballade, dis-je en prenant mon gilet.

— D'accord à tout de suite...

Mon mari me dépose un baiser sur la joue quand je passe devant lui. Une bise que je sens à peine, tellement mes pensées sont dirigées vers mon rêveur inconnu.

Naturellement, mes pas me conduisent à l'étang, à mon tronc.

Dès que je franchis la lisière de la forêt, je sens le vent m'envelopper, le souffle qui caresse ma peau, qui remonte le long de mes cuisses. Prise d'une impulsion, je m'arrête et je retire ma culotte. Je veux offrir mon corps aux caresses du vent.

Comme si celui-ci comprenait mes envies, je le sens plus fort. Il fait gonfler ma robe, arrêtée dans sa remontée par la ceinture. Il se met à tourbillonner, chaud comme le vent du désert dans les canyons étroits. Il me porte, il m'entraîne vers mon tronc.

Ce soir encore, j'entends ce rire cristallin et je vois en contre-jour cette silhouette qui me regarde. Je m'approche, c'est mon inconnu.

Il ouvre ses bras. Il m'invite à venir me blottir contre sa poitrine.

Je lui souris, il me sourit. Son visage se penche sur le mien. Je sens son souffle sur mes lèvres. Je m'abandonne à son baiser. Nos mains découvrent le corps de l'autre. Nous nous dévoilons l'un a l'autre.

En douceur, il m'allonge sur l'herbe épaisse. Je m'offre à lui, je l'accueille en moi. Le vent nous accompagne dans notre montée vers le plaisir.

Nos gémissements, ses grognements, mes cris sont les seuls bruits que l'on peut entendre. Dans un dernier assaut, un flot de plaisir inonde ma grotte d'amour.

L'instant est tellement magique que je perds conscience.

Quand je me réveille, le soleil est couché. Je suis seule.

Je m'assieds, un rire, un mouvement furtif dans un buisson.

Ai-je rêvé?

Je me relève, non ce fut bien réel. Je sens le plaisir de mon amant couler entre mes cuisses. Ma culotte que je tenais à la main a disparu.

Je cherche, je ne trouve rien. Hormi mes pas, rien d'autre, personne ne semble être venu ici. Je retire les brins d'herbe accrochés à mes cheveux et je rentre.

— Tu as été bien longue?

— J'ai profité jusqu'au bout, du coucher du soleil et du lever de la lune.

Sous la douche, je n'ai aucun doute, je n'ai pas rêvé. Dans le miroir, de la salle de bain, je le vois, il m'envoie un baiser.

Je me couche et nous nous retrouvons dans notre rêve.

Le frémissement du vent

Contrairement à ses habitudes, le lendemain, il revient à cette étang. Comme la veille, il s'installe à l'affut avec son appareil. Il espère qu'elle viendra.

Allongé sur le sol, il observe comme la veille le ballet des grues. Il ne peut s'empêcher d'admirer la grâce de ces oiseaux mais son esprit est occupé par la vision de la veille. Cette femme mystérieuse se montrera-t-elle encore ce soir dans le soleil couchant?

L'envol des grues annonce l'arrivée de la visiteuse. Elle est là, revêtue d'une longue robe diaphane qui lui permet de deviner les courbes de ce corps envoûtant dans le contre-jour offert par le coucher du soleil.

Ce soir, il pense à immortaliser l'instant dans son objectif. Il la voit, marcher lentement, regardant vers le lac. Elle sourit, elle ouvre les bras et il voit alors un homme sortir de la brume qui commence à recouvrir l'étang.

Il sent alors la brise se lever et le vent l'emporter vers la femme. Il est là devant elle. Lentement, il fait glisser les bretelles de sa robe. Il découvre son corps nu, ses seins fièrement dressés devant elle. Le fin tissu continue de glisser. Il peut voir la peau pale du ventre puis le triangle noir surmontant la fourche de ses cuisses et de ses longues jambes.

Quand elle est nue, elle avance d'un pas vers lui. Il ne lui dit rien, il la regarde. Elle lui sourit encore s'agenouille. Il ferme les yeux et se laisse emporter par la tendre caresse dont elle le gratifie. Il apprécie la douceur de ces lèvres sur son membre mis à nu. Le doux frottement de cette bouche le comble. Elle le conduit au plaisir. Il explose sans bruit.

Elle se relève et pose ses lèvres sur les siennes. Ils partagent un long baiser avant qu'elle se recule et disparaisse dans la brume.

Dans le crépuscule, une rafale de vent l'enveloppe. Surpris par de la poussière, il baisse les yeux. Quand il les relève, il est allongé sur le sol, son appareil photo toujours dirigé vers le tronc de la femme mystérieuse.

Le goût du vent

Comme hier, je me sens sereine. Mes rêves de la nuit m'avaient conduit auprès de mon homme-fée. Au matin, je voulais être sa fée toute la journée. Je choisis une longue robe qui malgré la légèreté du tissu ne dévoile pas ma nudité. J'avais compris cela, je devais être le moins vêtue possible pour mieux ressentir l'air sur ma peau. C'est cet air qui me permettait de compléter mon âme-fée.

Plusieurs fois au cours de la journée, je ressentis le plaisir que me procurait le vent qui se faufilait sous ma robe. Le soir, j'attendais avec impatience que les enfants et mon mari soient occupés chacun de leur côté pour rejoindre l'étang.

La brume donne un aspect fantomatique à la végétation. Je devine plus que je vois les grues immobiles au milieu de l'étang. Plus j'avance et plus je sens l'air sur moi, presque comme si des mains caressent le moindre centimètre carré de ma peau.

Soudain, je le vois. Il émerge de la brume, il porte une veste et un pantalon de toile claire, ses longs cheveux blonds lui font comme une couronne qui brille dans les derniers rayons du soleil. Je lui ouvre les bras, il vient.

Je le laisse descendre ma robe le long de mon corps quand je suis nue, il me soulève avec douceur et me dépose contre un arbre. Il me fait comprendre d'enlacer l'arbre. Comme s'il n'attendait que moi, le tronc lisse me permet de me serrer les mains. Un souffle d'air entoure mes poignets et les immobilise contre le tronc. Je suis immobilisée, à la merci de l'homme derrière moi. Ses mains me caressent le dos, les fesses. Je frissonne. Puis soudain, comme s'il savait que je n'attendais que cela, son sexe vient se glisser entre mes cuisses. Je remue mon bassin et le pieu de chair ou de vent me pénètre. Je ferme les yeux. Il me caresse la poitrine. Je me détends, j'accepte qu'il prenne possession de mon corps. Je ne me refuse pas.

Un souffle plus rauque, un coup de rein plus puissant et l'extase nous réunit. Je crie dans la nuit et ferme les yeux.

Il a disparu. A quelques pas de moi, ma robe est là, étalée sur le sol. Je la ramasse et rentre me coucher. Je sais que je n'ai pas rêvé. Même si à chaque fois que nous atteignons l'orgasme, je réalise que je suis seule, à chaque fois mon corps me fait comprendre que c'était bien réel et que j'ai bien fait l'amour avec un homme.

L'esprit du vent

Pendant des jours, des semaines puis des mois, Céline et le photographe se rendaient le soir à la tombée du soleil près de cet étang. Quand l'hiver fut là, elle ne se mettait plus nue, mais soulevait simplement sa robe ou sa jupe longue, et lui appréciait toujours autant de visiter le sexe accueillant de cette mystérieuse inconnue.

Ils ne se parlaient pas, leurs échanges se résumait à des caresses, une relation purement charnelle qui les conduisait hors du temps et l'espace pour un moment de pure félicité.

Il arriva ce qu'il devait advenir. Au bout de quelques mois, il voyait le ventre de Céline s'arrondir.

Un soir du printemps suivant alors qu'ils se retrouvaient, Céline ressentit les premières douleurs de l'enfantement.

Elle s'allongea sur son tronc, il guetta l'arrivée de l'enfant. Deux enfants naquirent, un garçon puis une fille.

Aussitôt avant même qu'ils ne poussent leur premier cri, une femme au long cheveux blonds et un homme sans âge sorti de l'onde et prirent les enfants dans leur bras.

Céline les vit disparaître dans la brume. Elle perdit connaissance.

A son réveil, il était là.

— Comment allez-vous? demanda-t-il.

— Que s'est-il passé? Répondit-elle en caressant son ventre.

— Je prenais des photos de l'autre côté du lac. Je vous ai vu, vous évanouir. Je me suis dépêché pour vous venir en aide. Et me voici.

— Merci, mais nous nous connaissons?

— Je ne pense pas, c'est la première fois sue je viens ici. Mais je serai ravi de mieux vous connaître.

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