Road-X-Trip (FR) Ch. 02

**Disclaimer : Ceci est une œuvre de fiction. Toute ressemblance des personnages avec des personnes réelles, vivantes ou décédées, est une pure coïncidence. L'auteur détient tous les droits exclusifs sur cette oeuvre. La publication sans l'accord de l'auteur de ce travail est strictement défendue.**

CHAPITRE 2 : INTERLUDE PLANANT

Après une longue attente entrecoupée de bêtises et manigances dont Olga et Richard sont spécialistes (surtout Olga), ils ont enfin embarqué à bord de l'avion. Passé les premières secousses du décollage, Olga a succombée à la fatigue accumulée des derniers jours de préparation, ainsi qu'au réveil nocturne du matin même. Sa tête repose sur l'épaule de son petit-ami, qui pianote sur son smartphone. D'allure sympathique quoique sérieuse, Richard est un grand gaillard, bien bâti. Le visage carré. Une masse de cheveux bruns sur la tête, rabattue d'un côté ou de l'autre, suivant les jours. Mais derrière cette apparence quelque trompeuse se cache en réalité un homme réservé et prudent. Richard n'est pas le genre casse-cou. Il est plutôt calculateur, maîtrisé. Pour trouver le grain de folie dans leur couple, mieux vaut s'adresser à Olga.

Richard lance une partie d'échecs contre l'intelligence artificielle. On peut lire à son état d'extrême concentration et sa mâchoire crispée la lutte féroce qu'il mène contre le robot pour prendre l'avantage. L'expression contrariée qui se dessine progressivement sur son visage semble indiquer que les choses ne tournent pas en sa faveur. Richard est pourtant un type intellectuel. Mais la logique des échecs lui échappe totalement. Exercice si différent de ses gestuelles mentales habituelles. Il ne parvient pas à prévoir plus de deux coups à l'avance. Du moins pas encore : il souhaite fermement s'améliorer.

Car Richard ne manque pas de détermination. C'est une de ses qualités. Il choisit avec soin ses objectifs, qu'il s'emploie à atteindre, fût-ce le travail d'un mois ou celui d'une vie. Richard est un gars très méthodique. Alors, quand il a été question de préparer le voyage, il a listé toutes les choses à faire. Il s'est occupé de trouver quelqu'un pour garder le chat, pour prendre soin des plantes. Mais surtout, il a géré toute la paperasse. Et c'était un gros dossier. Il y a géré les finances du voyage, l'achat des billets d'avion et les visas d'Olga. Toute allergique qu'elle est à la paperasse administrative, la jeune femme n'a pu échapper aux quelques formalités nécessaires à ce que tout soit en ordre avant le départ. Dans cette histoire, Richard a essentiellement joué le rôle de soutien et surtout de « motivateur ».

Ceci fait, Il a fallu trouver une solution à l'épineux problème posé par l'appartement qu'ils laissent derrière eux. Pas question de le quitter : Olga et Richard en sont tombés amoureux et comptent bien le retrouver à leur retour en France. Heureusement, le couple demeure en bon termes avec le propriétaire du lieu et a conclu un accord à l'amiable pour que l'appartement soit loué pendant l'année à un autre locataire. Ils n'ont eu qu'à trouver un box dans lequel déposer leurs affaires personnelles. Leur mobilier est resté à l'appartement.

Richard relève légèrement le volet du hublot et jette un coup d'œil à l'étendue d'eau qui s'étale à perte de vue sous ses yeux. Il pianote sur son petit écran personnel à la recherche de la page d'informations de vol. À présent, l'avion se trouve au beau milieu de l'océan Atlantique. Richard zoome sur la carte jusqu'à ce que la zone bleue occupe tout l'espace de la fenêtre. Ne reste alors plus que l'icône, s'agitant tantôt à droite, tantôt à gauche au centre du moniteur. Le rectangle de quelques centaines de pixels de large couvre la quasi-totalité de l'océan. Et pourtant, assis confortablement dans son siège, il est difficile pour Richard d'imaginer l'immensité bleue dont il est réellement encerclé. Comment peut-il envisager la vie marine qui grouille sous le rideau azur d'apparence si calme vu d'ici. Cependant, à la surface, les flots ne trouvent jamais de répit.

Richard jette un coup d'œil à l'intérieur de l'avion. Tout est si tranquille. Ceux qui ne dormaient pas regardent un film ou lisent. La quiétude qui règne rappelle à Richard de précédents voyages. Les vols en avion ont toujours exercé une aura particulière sur lui. L'excitation à l'arrivée au terminal, les fouilles et les boutiques Duty Free. L'attente avant l'embarquement. L'impatience. Les va-et-vient, les sons distants de l'aéroport. Puis les souffleries de l'avion sur le tarmac, le mot de bienvenue de l'hôtesse. Les mains crispées sur l'accoudoir, le dos enfoncé dans le siège au décollage. La prière que tout se passe bien. Puis le « ding » de la cloche marquant la fin de l'ascension, la fin du calvaire. Et de nouveau, le calme. Le bourdonnement étouffé des turbines. L'odeur si caractéristique de l'air dans la cabine pressurisée de l'avion. Et toujours, le masque de sommeil et les magazines de produits de luxe, le petit casque en plastique plié dans un sachet.

Richard penche son regard vers Olga. De tous, elle est sans aucun doute la plus paisible. Son visage endormi et tendre, libéré de toute contraction, repose mollement sur l'épaule du jeune homme. Son teint rose pâle contraste avec les petites taches de rousseur qui maculent ses pommettes et son nez retroussé. Une fine mèche de ses cheveux ondulés s'est prise au coin de ses lèvres. Elle respire si doucement que Richard parvient à peine à l'entendre. Ses mains reposent l'une sur l'autre contre son ventre. Il veut les serrer mais se ravise, craignant de la réveiller. À la place, il trouve un film et repose sa tête contre celle de sa petite amie.

Un peu plus d'une heure file et l'intrigue à l'eau de rose du film que Richard a déniché parmi les blockbusters et les comédies romantiques proposés par la compagnie prend décidément un tournant inattendu. Richard sent un léger mouvement sur son épaule. C'est Olga qui se réveille de sa longue sieste. Quelque chose en elle a dû la presser de sortir de son sommeil car, une fois que ses yeux sont en mesure de voir l'écran de Richard, elle se penche vers lui, retirant son oreillette.

-- Richard, tu regardes une comédie romantique et tu ne m'as même pas réveillée.

-- Je ne savais pas que tu aimais le genre! C'est nouveau? questionne-t-il, un peu confus.

-- Non, mais on peut brancher deux écouteurs sur le même écran! Te rends-tu compte? On peut regarder le film tous les deux en même temps! lance-t-elle d'un ton faussement naïf. Je veux rire avec toi de leurs histoires d'amour déchirantes! marmonne-t-elle plaintivement.

-- Branche tes écouteurs dans ce cas, fait Richard. Mais attention, c'est très sérieux. Hardin vient de trouver le numéro de téléphone de Robert dans les affaires de Tessa et il l'a très mal pris. La situation est très tendue, je n'ai pas du tout l'intention de rigoler, dit-il, contenant difficilement son sarcasme.

En guise de réponse, Olga lui décoche un grand sourire amusé et se blottit de nouveau contre son épaule.

-- Alors je suis prête, Richard.