La course du taureau

BÊTA PUBLIQUE

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- Eh! fainéant! ta femme t'attend. Ouste!

- Dis-moi, Églantine, je peux te laisser les documents de ma firme à signer?

En effet, cette belle dame est cadre dans le ministère des Transports, qui a fait office pour nous d'agence de rencontre quelques mois auparavant.

16h45. Aïe! J'ai pris du retard.

Tout à l'heure, sur le pas de la porte, comme j'étais sur mon départ, Églantine a brièvement repris son rôle de fonctionnaire et a jeté un coup d'œil administratif sur les papiers. Et moi, sans professionnalisme aucun, un regard admiratif sur son postérieur. C'est exactement comme ça que s'était passée notre première rencontre il y a six mois.

Je n'ai pu m'empêcher de parcourir ses proéminences charnues d'une main baladeuse, tandis qu'elle manipulait la paperasse. Les feuilles sont tombées en voletant dans le salon. C'est sur une demande de permis et une copie de contrat que nous avons fait l'amour à nouveau.

Je tombe de fatigue sur mon volant, les yeux plissés par les rayons directs du soleil. Je démarre le lecteur CD : une musique flamenco me ragaillardit un peu. Ai-je le temps de m'arrêter au Tim Horton's pour un café?

Mon dos me fait mal. Tous mes muscles et organes en fait. Surtout un...

Les images de la journée dansent dans ma tête. Claire aux jambes ouvertes. L'anneau d'Ariane. Églantine dans le soleil. Quelle journée!

Je me promets de me reposer enfin à la maison, de m'écrouler pour faire un somme : la pensée d'être dans mon lit m'aide déjà un peu... Jusqu'à ce que les paroles de Kalia viennent me hanter : « ... phase d'ovulation ... ne pas manquer son coup... bébé...» L'angoisse. Je regarde mon entrejambe :

- Hé! vous deux, vous commencez à faire le plein?

Entre un muffin et un beignet, quel serait le meilleur aphrodisiaque? Avec ou sans glaçage au chocolat?

Finalement, je ne me permets qu'un arrêt à la station d'essence du restaurant Madrid. À l'approche de Montréal, je pèse sur l'accélérateur à fond... Non! pas si vite, au contraire! Pour me donner du temps pour me régénérer. J'enfonce la pédale de frein. Un automobiliste me double en klaxonnant de fureur.

Les minutes passent. Je regarde les lignes de la route dans un état quasi hypnotique. Mais qu'est-ce que je suis en train de devenir? Est-ce toute ma vie est conduite par un phallus insatiable? Une vie de brute épaisse qui se rue dès que s'agite une robe sous ses yeux? Là, maintenant, je me sens comme sur le chemin de l'abattoir.

Le ciel est gorgé de sang alors que le soleil disparaît à l'horizon, lançant ses derniers feux. Je m'efforce d'oublier tout ça quand je pénètre dans le tunnel Louis-Hippolyte-Lafontaine.

Je cogne des clous, avachi sur le sofa du salon. Junior est nourri, couché, endormi. Je regarde distraitement la reproduction de Picasso au mur, je jette un coup d'œil au-dehors. C'est le silence. Kalia est allée voir la voisine, elle en a pour un instant. J'entends la porte s'ouvrir.

- Mon amour, peux-tu venir ici un instant? me lance-t-elle du hall d'entrée avec sa voix graveleuse.

L'instant de vérité approche. Comment puis-je la convaincre de reporter toute l'opération sans provoquer de crise? Je dirais : «Demain matin, Kalia, ce serait mieux. Tu sais que c'est à ce moment que le taux d'hormones mâles est...» Et elle me couperait la parole: «Mais oui, tu as raison, mon chou. Je me sens vache moi aussi ce soir. Mal à la tête...»

Je me lève et marche en titubant.

Elle est là, le coude appuyé sur le chambranle, la silhouette ondulant sous la serviette blanche qu'elle tient en place de la main. Je vois ses longues jambes d'albâtre esquisser un pas de danse. Kalia sourit de toutes ses dents, puis ses lèvres incarnates me lancent un baiser langoureux. Elle s'est dessiné un point de beauté sur la joue rose. Ses yeux verts pétillent. Visiblement, elle n'a pas du tout la migraine.

- Joyeux anniversaire, mon beau taureau!

Elle se passe sa main dans les cheveux et son chignon se défait dans une avalanche de cheveux dorés.

Tiens! j'avais oublié la date d'aujourd'hui. Je devais avoir la tête ailleurs.

Encore un geste, et la serviette tombe. Elle porte un corset rouge qui lui fait une taille de guêpe et des hanches pleines. Son pubis est nu et fraîchement rasé : je vois le sillon rose qui attend la semence. Elle pivote d'un côté et de l'autre pour que j'admire sa poitrine d'autant plus invitante qu'elle est projetée vers l'avant. J'observe que ses fesses sont plus rondes encore qu'à l'habitude. Tout est rendu proéminent par les vertus du corset.

Kalia me susurre :

- Dites-moi, señor Juan, est-ce que je vous tente?

Le vent se lève en moi. Torride. Entre mes jambes, je sens mon soc devenir d'acier. Je gratte du pied le tapis et la fixe droit dans les yeux :

- Ma chère, passez votre commande : dans neuf mois, vous voulez quoi, des jumelles ou des triplettes?

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