Histoire de Minette

Les chats sont des créatures de l'enfer

Je m'appelle Minette. Je me livre actuellement à mon activité favorite, la sieste. Je dors généralement entre mes deux repas quotidiens. Mon endroit préféré, c'est un couffin douillet, posé au pied du lit de l'humaine qui s'occupe de moi. Mais je peux dormir dans beaucoup d'autre endroit. Sur les genoux de mon humaine, dans son lit, son fauteuil, mais ici, c'est le seul endroit où elle ne me dérange pas en criant. Je déteste le bruit, les cris, le chahut. Cela trouble mon repos, qui est sacré.

Donc, je tue le temps en attendant mon prochain repas, blottie dans ma bulle de chaleur douillette, mon couffin au pied de son lit. Soudain, une tornade a pénétré dans mon espace, un couple d'humains, je reconnais mon humaine accompagnée d'un mâle de son espèce. Je suis sûre que c'est un mâle, à cause de son odeur nauséabonde. Ils sont emmêlés, et ils luttent pour se débarrasser de ces chiffons qui leur servent de fourrure.

Sans se déconnecter l'un de l'autre, ils arrachent ces substituts de fourrure qu'ils portent, et les éparpillent au hasard dans la pièce. Si jamais leurs cochonneries me tombent dessus, ils vont voir de quel bois je me chauffe. Dire qu'elle a le culot de me crier dessus en prétendant que je mets des poils partout. Moi qui suis si soignée.

Dès qu'ils ont fini de retirer leurs pelisses, ils se sont effondrés sur le lit, m'obligeant presque à déménager. Même si, bien sûr, je ne l'ai pas fait. Parce que j'étais ici en premier. Vu le remue-ménage, je devine qu'elle a ses chaleurs. Et l'autre, le mâle, celui qui pue, il est en rut, c'est sûr.

Ou peut-être qu'elle a juste faim, à en juger par la façon dont elle essaye d'avaler son organe sexuel. C'est étrange, je ne pensais pas que les humains se mangeaient entre eux. Enfin, ce n'est pas très malin, pour une humaine qui se prétend végétarienne, d'aller croquer cette saucisse...

Mais cela ne semble pas déranger le mâle, au contraire. Et elle n'a pas protesté lorsqu'il l'a retournée pour lui laper les parties génitales à son tour. Je suppose que les grosses mamelles suspendues à son torse sont des sortes de boîtes à lait, mais bon, qu'est-ce que j'en sais? Je ne suis qu'une chatte, pas une experte en anatomie humaine.

Elle miaule comme un chaton nouveau-né. Soudain, j'ai tout compris de la nature humaine. Puisqu'ils sont incapables de se nettoyer les parties génitales en les léchant comme le commun des mortels, ils se toilettent mutuellement, les uns les autres. Maintenant, tout est logique.

Juste au moment où je commence à m'assoupir, rassurée d'avoir tout compris des humains, brusquement le mâle la retourne. Bon, avec les cris qu'elle pousse, plus leurs gémissements, je comprends que ma sieste est finie. Je m'assois au pied du lit pour faire ma toilette en attendant que le calme revienne. Ce n'est pas parce que je suis une chatte que je ne comprends pas ce qu'ils manigancent. Il l'a coincée sur le lit, et il lui a grimpé sur le dos. Il était bel et bien en rut, et elle a ses chaleurs !

Elle ne se contente plus de miauler, elle hurle. Oui, elle est en chaleur. Mais cette grosse saucisse qu'il lui rentre dans son petit trou doit lui faire mal. Si ça continue, elle va ameuter tout l'immeuble. En attendant, elle me casse les oreilles.

« Qu'est-ce qui ne va pas, Michel? Pourquoi tu t'arrêtes? »

« Ton chat est sur le lit, et il nous regarde. »

« Et? »

« Et c'est flippant ! C'est bizarre et troublant ! »

« Minette ! Vilaine fille ! Fous le camp ! Pschitt ! »

Je l'ai ignorée, bien sûr. Les humains voudraient nous commander, mais je lui ai rappelé qui est le maître ici, en poursuivant dédaigneusement mon toilettage.

Ils ont repris leur rituel d'accouplement, mon humaine maintenant sur le dos, les jambes levées bien haut, tandis que le mâle lui saute sur le ventre. Le lit tremble, grince, vibre, et j'ai du mal à me tenir debout. Les claquements de leurs chairs pâles me donnent envie de cracher une boule de poils.

En parlant de boules de poils, j'ai une vue parfaite de ce qu'ils ont entre les pattes arrières. J'ignorais que les humains avaient de la fourrure entre les jambes. J'interromps mon toilettage pour regarder attentivement cette partie de leur anatomie. Mes oreilles se dressent en voyant cela. Ma parole, j'ai la berlue, ou il y a deux boules de poils qui pendouillent et qui s'agitent?

Me dites pas que ce n'est pas vrai ! C'est quoi ces trucs qui rebondissent? Mes yeux traitent l'information en essayant de suivre leur rapide agitation. Aucun doute n'est permis, ce sont des souris. Sinon, d'où proviennent tous ces grincements? Il faut que j'examine la situation de près. Mon instinct de chasseur guide mes gestes. En rampant, les oreilles couchées, je m'approche lentement de ma cible, les yeux rivés sur mes proies.

Je dois être rapide et frapper à coup sûr, ces bestioles dansent tout le temps. Arrivée à bonne distance, je bondis, toutes griffes dehors. Un cri déchirant résonne dans la pièce, et le mâle saute du lit.

« Oh mon Dieu ! Michel ! Que se passe-t-il? »

« Ton putain de chat ! Cette saloperie a essayé de me castrer ! »

« Quoi? Oh, putain ! Ça va? »

« Non ! Ça ne va pas ! J'ai les couilles en sang ! »

« Oh putain ! Ne bouge pas, je vais chercher de la gaze et du désinfectant, ou un pansement ... »

« Un pansement? Pour mes couilles? Bon Dieu, Laura, donne-moi juste du papier toilette ou..... Ah, merde, ça pique ! »

Holà, du calme, une erreur est toujours possible. Et puis, soyez honnête. On n'agite pas ce genre d'objet sous les yeux d'un fin chasseur comme moi.

Après avoir nettoyé les dégâts et enfilé ses pelures qui lui servent de fourrure, l'humain mâle est parti en colère. Mon humaine s'est assise à côté de moi sur le lit, la mine triste.

« Bon sang, Minette. Le premier gars que je ramène à la maison depuis six mois, et tu as tout gâché »

En soupirant, elle fouille dans le tiroir de sa table de nuit.

« Je vais devoir me contenter de mon vibromasseur, ce soir »

Elle s'est installée sur le lit, et elle a commencé son rituel.

Dépêche-toi, ça va être l'heure de ma gamelle.